Mort d’un révolutionnaire

Un article de Jean-Pierre DELAHAYE :

Mort d’un révolutionnaire

Le leader charismatique de la révolution cubaine, Fidel Castro, s’est éteint vendredi 25 novembre, à la Havane à l’âge de 90 ans.

 Raoul Castro, actuel président, a annoncé la nouvelle à la télévision nationale, terminant son allocution par ces mots « hasta la victoria siempré » Une petite phrase qui résume toute une vie de combat pour le droit à l’indépendance du peuple cubain, pour l’émancipation des peuples et qui résonne dans la tête des insoumis du monde entier.

Quel destin pour le jeune avocat libéral épris de justice et de liberté, qui au milieu des années 50, prend les armes contre les tenants du pouvoir à la Havane. A l’époque le pays, dirigé par le dictateur Batista, est livré aux pillards locaux et étrangers soutenus par Washington et la mafia états-unienne. C’est le règne des gangsters.  La corruption, la prostitution gangrène le pays. La misère, la faim, l’analphabétisme décime le peuple… Avec quelques compagnons dont Ernesto Che Guevarra et le soutien du peuple et après plusieurs tentatives, Fidel Castro entre triomphant à la Havane. Ce combat inspirera des générations de progressistes en Amérique Latine et sur tous les continents.

Installés au pouvoir, Fidel et les « Barbudos » prennent des mesures radicales de nationalisations et se lancent dans un vaste programme pour l’Education, la Santé et l’électricité pour tous.

En dépit de ses mesures qui font frémir Wall-Street, le nouveau gouvernement cubain ne ferme pas la porte aux Etats-Unis.

Ce sont les Etats-Unis qui vont tourner le dos à Castro, alors même qu’il envisage de coopérer économiquement. Après l’écroulement de la dictature, il se rend aux USA, notamment pour négocier la vente de la récolte sucrière. Les Etats-Unis refusent de l’aider.

En février 1960, en pleine guerre froide, Cuba et Moscou passent un accord sucre contre pétrole. Le début d’une grande et longue coopération. S’en est trop pour l’Amérique qui ne peut tolérer une telle alliance entre l’URSS et une petite ile à 250 kilomètres de ses côtes. Les américains décident le blocus qui perdurera jusqu’à nos jours. Ils tenteront même un débarquement en force à la « Baie des cochons ». La « crise des missiles » renforcera de part et d’autres une franche inimitié d’autant qu’elle obligera le président de la première puissance mondiale, chef de file du monde occidental, JF Kennedy, à s’engager à ne pas envahir Cuba. Un véritable camouflet ! Par la suite, Fidel Castro échappera à plusieurs tentatives d’assassinats…

Sur le plan international il tentera de sortir de la logique des blocs au sein du « mouvement des non-alignés » mais on retiendra surtout le rôle de Cuba pour son implication, son aide et son soutien à la libération des peuples. De l’Algérie à l’Afrique du Sud en passant par l’Angola etc …jusqu’à nos jours avec la coopération internationale pour résoudre les crises de santé…

Pendant plusieurs dizaines d’années Cuba résistera par la volonté de son peuple et grâce à l’aide des pays du « bloc socialiste ». L’effondrement de ce système sera une nouvelle terrible épreuve pour les cubains mais l’ile ne pliera pas…

Bien sûr cette épopée, cette histoire n’a pu se construire sans des hésitations, des tâtonnements et des erreurs. Pas question de le nier ici. Le parti unique, la liberté de la presse, une économie en berne qui demande audace et ouverture tout cela ne peut-être ignoré. Mais n’oublions jamais le contexte d’enfermement et de boycotte dans lequel le pays s’est trouvé pendant plus de 40 longues années. Et qui pourrait croire que les millions de cubains qui ces derniers jours sont descendus dans la rue pour rendre hommage à Fidel Castro y sont allés contraints et forcés ? L’homme a marqué l’histoire de son pays, l’histoire de l’Amérique latine, l’histoire du monde. Son ami le prêtre domicain brésilien, Frei Betto, apprenant sa mort a déclaré « il a fait de Cuba une nation souveraine » Peut-être que tout tient en ces quelques mots.

Repose en paix Commandante.

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