



Une contribution de Monsieur Jihad WACHILL sur la situation en Syrie.
En l’état actuel des choses, les termes exacts de l’accord entre les autorités syriennes et le PYD (principal parti kurde syrien), qui scelle sous auspices russe l’engagement de l’armée syrienne en soutien aux Kurdes syriens contre l’invasion turque du nord de la Syrie, ne sont pas connus. Mon propos n’est donc qu’une exégèse du peu d’informations qui ont filtrées autour de ces négociations.
Le départ des soldats occidentaux du sol syrien :
Le passage des Kurdes syriens sous orbite occidentale et l’installation de bases militaires US, britanniques ou françaises sur le sol syrien avec l’aval des Kurdes, était jusque là la principale pierre d’achoppement entre les autorités syriennes et le PYD. Il s’agissait même pour Damas d’un préalable non-négociable à toute discussion sérieuse.
Sur ce point, il est probable que les autorités syriennes aient obtenu satisfaction sur toute la ligne. Les USA en ont pris acte, et évacué la majeure partie de leurs soldats du sol syrien. Le gouvernement français fait par contre mine de ne pas comprendre que sa présence militaire n’est plus souhaitée, tentant de faire passer pour actions ses gesticulations.
Toutefois, cet accord se heurte à une difficulté : ce qu’il reste de troupes occidentales semble se regrouper dans les champs pétrolifères autour de Deir-Ezzor. Et il n’est pas certain qu’elles les quittent de bonne grâce…
La restitution des champs pétroliers aux autorités syriennes :
C’est le second point sensible des relations entre Damas et les Kurdes syriens ces dernières années. Et la raison pour laquelle la manœuvre occidentale actuelle peut être vue comme destinée à tenter de saboter l’accord syro-kurde en rendant un de ses points essentiels impossible à mettre en œuvre.
Ces champs pétrolifères se trouvent pour l’essentiel dans la région de Deir-Ezzor. Il s’agit de secteurs où les Kurdes ne représentent qu’une part infime de la population et qui ont été occupés par eux (via les FDS), stimulés par les Occidentaux, en profitant de l’effondrement de Daesh devant l’offensive syrienne pour lever le siège de Deir-Ezzor.
En plus de ce secteur, il semblerait que l’accord syro-kurde prévoie la restitution de Raqqa et ses environs, voire d’autres secteurs comme Mandjib, aux autorités syriennes. Les troupes syriennes semblent déjà être en train de s’y redéployer.
Une reconnaissance de facto de l’autonomie kurde, réduite toutefois à un périmètre plus modeste ?
De ce qui ressort des déclarations du PYD en marge comme après la signature de l’accord syro-kurde, cet accord ne met pas fin à leur autonomie de facto. Il ne s’agirait donc pas d’une « capitulation », contrairement à ce que peuvent laisser supposer nos médias. Il est probable qu’il en réduise toutefois le périmètre, sur le plan territorial comme décisionnel.
Sur le plan territorial, il est probable que les secteurs où les Kurdes sont minoritaires et actuellement sous leur contrôle soient restitués à l’autorité du gouvernement syrien. Par exemple la partie du gouvernorat de Deir-Ezzor actuellement sous leur contrôle, l’essentiel du gouvernorat de Raqqa, Mandjib, ou encore de secteurs de Hassaké et Qamichli.
Sur un plan décisionnel, les Kurdes renonceraient à toute velléité d’indépendance, ou encore à la politique de « kurdisation » forcée de l’enseignement dans la zone restant sous leur contrôle. Une politique très mal vécue par les populations non-kurdes de cette zone et qui a contribué à y tendre les relations intercommunautaires, au passage.
De plus, un certain nombre de prérogatives seraient du ressort de l’Etat syrien (surtout celles régaliennes, le contrôle des frontières par exemple), « partagées » ou soumises peu ou prou à son autorisation.